L’agrobusiness est un secteur clé pour l’essor économique de la République Démocratique du Congo. Cependant, il reste largement sous-exploité. Laurette BIRA, consultante en projets agricoles et PDG de I-KITUNGA, une entreprise spécialisée dans la distribution et la transformation des produits agricoles en RDC depuis 2019, s’est entretenue avec Pourelle.info pour partager sa vision d’un secteur agricole plus productif et industrialisé.

« L’agriculture doit être une priorité nationale »
Pourelle.info : Comment définissez-vous l’agrobusiness et quelle est son importance pour la RDC ?
Laurette BIRA : L’agrobusiness regroupe toutes les activités économiques liées à l’agriculture : la production, la transformation et la commercialisation des produits agricoles. En RDC, ce secteur représente un immense potentiel, mais il est encore très peu exploité. Pourtant, il pourrait être un véritable moteur économique et un levier de lutte contre le chômage.

Pourelle.info : Quels sont les principaux obstacles qui freinent le développement du secteur agricole en RDC ?
LB : Le problème majeur, c’est le manque d’accompagnement des agriculteurs et des producteurs. Beaucoup manquent de formations adaptées et d’accès aux infrastructures de base. De plus, il y a un désengagement gouvernemental et trop peu d’initiatives pour encourager l’industrialisation du secteur.
Nous avons également une forte dépendance aux importations : 70 % des produits que nous consommons viennent de l’étranger, alors que notre pays bénéficie d’un climat tropical favorable à l’agriculture. Nous avons tout pour produire du maïs, des bananes, des haricots, des tomates, du cacao, du café ou encore de l’huile de palme. Pourtant, nous continuons d’importer ces produits au lieu de les produire localement et de les transformer nous-mêmes.
« Il est temps de transformer nos ressources agricoles »
Pourelle.info : Pourquoi l’industrialisation est-elle essentielle pour le secteur agricole congolais ?
LB : Nous avons les ressources naturelles et humaines nécessaires pour développer un véritable modèle économique agricole. Mais sans industrialisation, nous resterons limités à une production à petite échelle, incapable de répondre aux besoins de la population et encore moins d’exporter.
L’industrialisation permettrait d’augmenter la rentabilité du secteur, de réduire notre dépendance aux importations, et surtout de créer des emplois pour les jeunes, qui représentent 70 % de la population active. L’exemple des pays occidentaux montre que leur développement économique repose sur la révolution industrielle. La RDC doit suivre cette voie pour bâtir une agriculture moderne et compétitive.
« L’agriculture peut devenir un moteur de croissance »
Pourelle.info : Quelles sont les actions prioritaires pour redynamiser le secteur agricole en RDC ?

LB : Si nous voulons faire de l’agriculture un levier de croissance économique, nous devons :
- Accompagner les agriculteurs et les éleveurs en leur fournissant des équipements modernes et des semences de qualité.
- Renforcer les coopératives agricoles et encourager la création de nouvelles structures plus solides.
- Former les acteurs du secteur pour améliorer la productivité et l’innovation.
- Industrialiser le secteur agricole pour transformer localement nos productions et augmenter leur valeur ajoutée.
Si ces mesures sont appliquées, nous pourrons non seulement assurer notre autosuffisance alimentaire, mais aussi exporter nos produits et générer des revenus pour le pays.
« Il faut passer de la théorie à la pratique »
Pourelle.info : Quel message souhaitez-vous adresser aux autorités et aux entrepreneurs agricoles ?
LB : Nous devons arrêter les discours et agir concrètement. Il est temps de bâtir une réforme industrielle pour l’agriculture congolaise. Chacun a un rôle à jouer : les autorités doivent créer un cadre favorable et encourager les investissements, tandis que les entrepreneurs doivent se regrouper et innover.

L’agriculture doit devenir une priorité nationale. Ce n’est qu’en transformant nos matières premières que nous pourrons stimuler l’économie, créer de l’emploi et assurer un avenir meilleur à notre pays.
« L’opportunité est là, à nous de la saisir ! »
Divine LUKOMBO